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Cet article a été publié pour la première fois par the Arctic Institute

Utilisez ce que vous avez, prenez seulement ce dont vous avez besoin, partagez ce que vous avez, et partagez ce que vous savez. Voilà le message des jeunes leaders qui ont discuté de la souveraineté alimentaire dans l’Arctique lors du tout premier Programmathon sur les politiques de l’Arctique (APH), qui a eu lieu à Reykjavík en octobre dernier.

Les programmathons sur les politiques rassemblent les gens pour discuter de questions de politique et créer des solutions tangibles et réalisables. Le programmathon a vu de nouveaux leaders des communautés autochtones et locales du nord du Canada, du Groenland, de Sápmi, de Finlande, de l’Islande, de la Suède et de l’Alaska se réunir pour échanger des idées, se lancer des défis et créer des solutions pendant deux jours de discussions intenses.

Organisé par The Gordon Foundation (qui a auparavant mené trois programmathons sur les politiques nordiques avec des jeunes canadiens), le Centre international canadien de l’Arctique, et le Forum des maires de l’Arctique, le programmathon a mis l’accent sur la souveraineté alimentaire, défini comme « le droit des peuples à une alimentation saine et culturellement appropriée, produite selon des méthodes écologiquement rationnelles et durables, et leur droit de définir leurs propres systèmes alimentaires et agricoles ».

Alors que le concept de sécurité alimentaire, plus connu, se concentre sur l’accès à une nourriture suffisante et nutritive, la souveraineté alimentaire approfondit la question de l’alimentation et de ce qu’elle signifie pour les personnes et les communautés.

Les participants au programmathon ont commencé à discuter de la souveraineté alimentaire d’un point de vue pan-arctique avec l’aide de l’animatrice Jennifer Spence, du Belfer Center for Science and International Affairs de Harvard, et d’Anders Oskal, secrétaire général de l’Association mondiale des éleveurs de rennes.

Le résultat est un ensemble concis et réalisable de recommandations de politiques, rédigées en collaboration par les participants au programmathon. Tout en proposant des moyens pratiques aux gouvernements et aux décideurs pour aborder la question de la souveraineté alimentaire, les recommandations transfèrent aux communautés le pouvoir de dicter leur bien-être par le biais de la souveraineté alimentaire. Ils s’appuient sur une perspective partagée par les jeunes d’un modèle de gestion durable, comprenant les « 4 R que sont le respect, la réciprocité, la responsabilité et la redistribution de nos ressources alimentaires. »

Les recommandations innovantes et de grande envergure sont réparties en quatre sections et abordent des questions politiques précises – sous la section Partagez ce que vous avez, il s’agit des obstacles considérables au commerce circumpolaire.

Les participants recommandent la création d’un cadre de travail pan-arctique pour les connaissances et le commerce alimentaires et d’un groupe directeur chargé de rédiger un accord circumpolaire sur le commerce des denrées alimentaires. L’accord porterait sur le commerce est-ouest plutôt que sud-nord, soutiendrait la culture transfrontalière de denrées alimentaires par les communautés locales et autochtones, et reconnaîtrait que la flore et la faune sont plus anciennes que les frontières des États-nations et s’étendent sur de vastes territoires. De plus, les gouvernements concernés devraient fournir des mesures incitatives pour un accès équitable à des aliments nutritifs et appropriés sur le plan culturel.

Dans la section utilisez ce que vous avez, on note que lorsque les peuples de l’Arctique ont accès à une alimentation locale et traditionnelle, cela améliore leur qualité de vie et leur bien-être, tandis que l’économie locale et traditionnelle de l’Arctique en bénéficie également.

Il est recommandé d’élaborer de nouvelles lignes directrices en matière de nutrition qui soient pertinentes sur le plan local et culturel, et de mener des recherches pour combler les lacunes en matière de connaissances sur la valeur nutritive des divers aliments locaux et traditionnels et sur les besoins nutritifs des populations locales.

Les récolteurs de l’Arctique et autochtones et les entreprises de petite taille, gérées et exploitées localement ont aussi besoin du soutien des gouvernements pour vendre leurs produits. Nombre d’entre eux sont criminalisés pour avoir vendu des aliments cultivés, récoltés, chassés, pêchés et élevés localement, alors que les grandes entreprises en tirent profit.

Le changement climatique est un thème clé, les événements météorologiques extrêmes et les changements dans la migration de la faune sauvage faisant partie des répercussions sur les systèmes alimentaires. La dépendance à l’égard des importations de denrées alimentaires n’étant ni durable ni bénéfique pour les économies locales, les gouvernements devraient soutenir les systèmes alimentaires locaux et leur capacité à s’adapter au changement climatique. Ces mesures incitatives comprennent des subventions, des carrefours et des réseaux de partage des connaissances interculturelles, ainsi que la mise en œuvre de systèmes de gestion adaptative.

Prenez seulement ce dont vous avez besoin aborde les questions de règlementation et de santé environnementale tandis que les recommandations de politiques sous le thème partagez ce que vous savez inclut un système basé sur les programmes de l’UE relatifs aux produits d’origine désignés et aux indications géographiques protégées. Cette démarche s’étendrait à la culture et aux traditions liées aux produits alimentaires dans l’ensemble de l’Arctique, tandis que l’autonomisation des jeunes et le fait de veiller à ce que la recherche et la collecte de données soient menées par les communautés constituent également des priorités politiques.

Suite au programmathon, les participantes Patricia Johnson-Castle et Harmony Wayner ont partagé les recommandations de politiques à l’Assemblée du cercle arctique lors du panel Souveraineté alimentaire : Solutions dans l’Arctique, et les jeunes leaders continuent de diffuser les recommandations dans leur communauté. Comme le soulignent les participants au programmathon dans leur déclaration d’ouverture, ces recommandations de politiques devraient être une priorité dans les discussions sur les politiques de l’Arctique.

Cet article a été publié pour la première fois par the Arctic Institute

Photo : Les participants au programmathon sur les politiques de l’Arctique se réunissent à la résidence de l’ambassadrice du Canada en Islande, Jeannette Menzies.